novembre 24, 2024

IRATV – ISSN 2730-437X

Le point de vue de l’expert en développement international ALIOUNE Ndiaye sur l’agenda de transformation Vision 2050

La critique de l’agenda de transformation Vision 2050 à travers le prisme de l’approche « Bottom-Up » (ou ascendante) et la prise en compte de toutes les sphères sociales repose sur l’idée que le développement durable et inclusif doit impliquer activement les acteurs locaux, les populations à la base et une diversité de groupes sociaux. Voici une analyse critique spécifique selon ces perspectives :

  1. Limitation de l’approche « Top-Down » au détriment du « Bottom-Up »

Critique : Vision 2050 semble fortement ancrée dans une approche « Top-Down », avec des décisions venant principalement des élites et des institutions centrales, sans un engagement suffisant des communautés locales dans la conception et la mise en œuvre des politiques.

Justification : Une approche « Bottom-Up » est essentielle pour que les réformes et projets proposés répondent réellement aux besoins spécifiques des populations locales. Les communautés doivent être impliquées dès le départ dans l’identification des priorités, l’allocation des ressources, et l’évaluation des résultats. Une participation communautaire faible limite souvent l’appropriation des projets et conduit à des résultats inadaptés ou inefficaces, notamment dans les secteurs comme l’agriculture, l’éducation, et les services de santé.

Recommandation : Pour pallier cette limitation, Vision 2050 doit encourager des mécanismes de participation locale à chaque étape de la mise en œuvre des projets, par exemple à travers des consultations publiques, des comités locaux ou des partenariats entre le secteur public et les organisations communautaires.

  1. Négligence des initiatives locales et de l’économie informelle

Critique : L’agenda semble privilégier des projets de grande envergure ou des réformes macroéconomiques qui pourraient négliger l’importance des initiatives locales et l’intégration de l’économie informelle.

Justification : L’économie informelle, qui représente une grande partie de l’activité économique dans de nombreux pays en développement, n’est souvent pas suffisamment intégrée dans les politiques de transformation économique. Les initiatives locales, souvent innovantes mais sous-financées, devraient être mieux prises en compte. Le fait de se concentrer sur des projets d’industrialisation ou d’infrastructures à grande échelle peut marginaliser des segments essentiels de la population.

Recommandation : L’agenda devrait inclure des stratégies pour soutenir les petites entreprises locales et intégrer davantage l’économie informelle dans le processus de transformation, notamment via la formalisation de ces activités et la formation des acteurs du secteur informel.

  1. Sous-représentation des groupes marginalisés dans les décisions stratégiques

Critique : L’agenda pourrait ne pas donner une voix suffisante aux groupes marginalisés comme les femmes, les jeunes, les populations rurales et les personnes vivant dans des conditions de pauvreté extrême.

Justification : Dans une véritable approche « Bottom-Up », ces groupes devraient jouer un rôle central dans les processus décisionnels et être vus non seulement comme des bénéficiaires passifs mais comme des acteurs clés du développement. Or, dans la Vision 2050, il existe un risque que ces populations soient considérées comme des groupes cibles de politiques décidées en haut lieu, sans qu’elles aient une réelle influence sur les choix faits.

Recommandation : Mettre en place des plateformes participatives permettant à ces groupes marginalisés de contribuer aux décisions stratégiques à tous les niveaux, à travers des associations, des organisations communautaires ou des forums citoyens. Un processus inclusif est nécessaire pour s’assurer que la transformation soit juste et équitable.

  1. Centralisation excessive des ressources et des décisions

Critique : Vision 2050 peut renforcer la centralisation des ressources et des décisions au niveau national, ce qui pourrait empêcher une répartition équitable des bénéfices du développement dans les régions les plus pauvres.

Justification : Le développement doit être décentralisé pour que les communautés locales aient la capacité de répondre aux défis spécifiques qu’elles rencontrent. La centralisation des décisions économiques et politiques empêche souvent une allocation flexible des ressources, tenant compte des particularités locales. Cela peut notamment exacerber les disparités régionales entre les zones rurales et urbaines, ou entre les régions plus prospères et celles plus en difficulté.

Recommandation : Développer des mécanismes de décentralisation qui confient plus de pouvoir aux autorités locales et régionales en matière de développement économique, de gestion des ressources et de services publics. Cela pourrait également inclure un budget participatif dans certaines régions.

  1. Faible intégration de la diversité des sphères sociales

Critique : L’agenda ne semble pas prendre en compte suffisamment la diversité des sphères sociales – y compris les différences culturelles, ethniques, religieuses ou territoriales – dans la conception des politiques de transformation.

Justification : Le développement ne peut pas suivre une approche unique dans un pays aussi diversifié. Les solutions doivent être adaptées aux réalités et aux valeurs des différentes communautés. Par exemple, les stratégies de développement rural en Casamance ne devraient pas nécessairement être les mêmes que dans les régions sahéliennes du Nord. Ignorer cette diversité pourrait compromettre l’efficacité des initiatives et exacerber les conflits ou les tensions sociales.

Recommandation : Intégrer des approches sensibles à la culture et au territoire, en associant des acteurs locaux dans la définition des priorités et des méthodes de mise en œuvre. Il est crucial de reconnaître et de valoriser les savoirs traditionnels, en particulier dans des domaines comme la gestion des ressources naturelles ou la préservation de la biodiversité.

  1. Problèmes d’inclusion socio-économique

Critique : Vision 2050 pourrait ne pas suffisamment traiter des obstacles systémiques à l’inclusion socio-économique, notamment l’accès limité aux services essentiels pour les groupes vulnérables, comme l’éducation de qualité, les soins de santé, ou la sécurité sociale.

Justification : La réussite d’une transformation à long terme repose sur l’inclusion de toutes les couches sociales dans les processus de développement. Cependant, l’inégalité d’accès aux services de base persiste, ce qui pourrait empêcher certains groupes de participer pleinement aux opportunités économiques que Vision 2050 cherche à créer. Cela risque d’accentuer les écarts de richesse et de bien-être entre les élites et les populations marginalisées.

Recommandation : Accorder une attention particulière à la réduction des inégalités socio-économiques en garantissant un accès universel aux services sociaux et en mettant en place des programmes de protection sociale pour les plus démunis.

  1. Exclusion des jeunes et leur faible participation

Critique : L’agenda pourrait ne pas suffisamment impliquer les jeunes dans le processus décisionnel et leur rôle dans la transformation future du pays.

Justification : Les jeunes représentent une part importante de la population et sont à la fois les bénéficiaires et les moteurs du changement. L’absence de mécanismes leur permettant de participer activement à l’élaboration des politiques publiques peut entraîner une déconnexion entre les ambitions de l’agenda Vision 2050 et les réalités et aspirations de cette population.

Recommandation : Créer des mécanismes formels pour inclure les jeunes dans le processus de prise de décision, tels que des conseils consultatifs jeunesse, des forums ou des programmes de mentorat, où ils peuvent influencer directement les politiques qui les concernent.


Conclusion

Une critique du point de vue de l’approche « Bottom-Up » et de la prise en compte de toutes les sphères sociales montre que Vision 2050 gagnerait à :

Renforcer la participation locale et l’appropriation communautaire à tous les niveaux.

Mieux inclure les groupes marginalisés, notamment les femmes, les jeunes, et les populations rurales.

Décentraliser la gestion des ressources et des décisions pour une répartition plus équitable des bénéfices du développement.

Adapter les stratégies aux réalités locales et culturelles pour une transformation plus inclusive et durable.

Une telle démarche permettrait de garantir que la transformation visée soit réellement portée par la base, garantissant ainsi une participation active, une appropriation collective, et une plus grande résilience.
Alioune Ndiaye
Expert en développement international
Écrivain
Agent au Ministère de la Formation professionnelle

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